Debout le roman-photo !

Debout le roman-photo !

Alors qu’a priori rien ne le prédis­po­sait à une telle malé­dic­tion, le roman-photo se trouve dans une impasse. On aurait pu penser le terreau favo­rable : grand pays de bande dessi­née, grand pays du cinéma, la France aurait pu être grand pays de roman-photo. Pourquoi ce rendez-vous manqué ?

Extrait :

Dans une société où la surpro­duc­tion est une branche fragile à laquelle l’in­dus­trie s’ac­croche pour ne pas voir le vide sous ses pieds, la frange artis­tique se trouve ense­ve­lie sous l’ava­lanche des produits de diver­tis­se­ment : si les dicta­tures brûlent les livres, nos démo­cra­ties les noient.1

Cette situa­tion n’est pas réjouis­sante, bien sûr, et les oiseaux de mauvais augure auront tôt fait de dire que l’em­bal­le­ment dans lequel se trouve l’in­dus­trie va proba­ble­ment abou­tir à son effon­dre­ment. Pour­tant, pour détes­table que soit ce système, on peut tout de même déplo­rer que le roman-photo en soit exclu. Toutes géné­ra­tions confon­dues, on n’ar­rive pas à dix artistes, le compte n’y est pas, les auteurs ont jeté l’éponge. Qui a envie de pratiquer un moyen d’ex­pres­sion noyé dans l’eau de rose ? Personne. Le roman-photo est un cas d’école : c’est à ma connais­sance le seul moyen d’ex­pres­sion qui a été anéanti par son utili­sa­tion dévoyée au seul diver­tis­se­ment pur, sans autre but que de « détour­ner de l’es­sen­tiel », pas même un petit saupou­drage artis­tique ni un alibi éduca­tif, rien.

Il n’y a pas survécu.

L’en­cé­pha­lo­gramme plat du roman-photo est-il syno­nyme de mort abso­lue ? Évidem­ment non, un moyen d’ex­pres­sion ne meurt pas, il attend son heure.